Qui se souvient des débuts de Michael Schumacher au sein de l'écurie Jordan ? Pourtant, les essais qu'il fit à la veille du GP de Belgique ont tellement impressionné Trevor Foster qu'il s'en souvient encore aujourd'hui.
A Spa, pour son premier Grand Prix, Michael Schumacher fait équipe avec Andrea de Cesaris, un spécialiste du circuit. Trevor Foster, Team-Manager de l'équipe Jordan, se souvient: " J'ai expliqué à Michael que j'allais demander à Andrea de lui donner un ou deux tuyaux, à bord d'une voiture de série. Il pourrait ainsi le mettre en garde sur les pièges et les virages difficiles. " De Cesaris accepte le principe, mais, à l'heure prévue, l'Italien est retenu avec Eddie Jordan. Il renégocie son contrat. Trevor Foster demande à Schumacher d'attendre un peu. " A ce moment, Michael m'a scié. "Pas de problème", a-t-il répondu, "j'ai un vélo dans le coffre de ma Mercedes. Je vais faire un tour de circuit avec, en attendant" Lorsqu'il est revenu, Andrea n'était toujours pas disponible. "Pas de problème", a encore répondu Michael, "je refais un tour avec mon vélo. " Ce type avait eu la clairvoyance d'apporter un VTT. Il n'a pas demandé à l'équipe de lui prêter un vélo, un scooter, voire une voiture. Non, il avait apporté son propre VTT. Avant de quitter son appartement, il s'était demandé: "De quoi aurai-je besoin là-bas ?" " Professionnel.
"Le lendemain, Michael a pris la piste pour la première fois. Il était tout de suite dans les temps. Après ses quelques séries de tours, je lui ai demandé s'il avait l'impression de 'surconduire' à certains endroits. Nous parlions par radio, et il m'a répondu : "Non, je suis à la limite, mais je ne la dépasse pas.'' Il m 'a dit cela comme je vous le dis maintenant, sans passion, sans émotion, rien. "je suis à la limite, mais je ne la dépasse pas..." C'étaient là ses premiers essais officiels au volant d'une Formule 1!!"
Le deuxième épisode intéressant de l'histoire s'est déroulé un peu plus tard. De Cesaris n'était pas satisfait du comportement de sa voiture. Quelque chose se produisait sur les bosses. Il abandonna sa voiture de course pour prendre le mulet. La monoplace de Michael, elle, était immobilisée par une fuite d'eau. J'ai donc demandé à Schumacher de prendre la voiture de course d'Andrea. Nous avons changé les sièges, ajusté les ceintures et d'autres bricoles. Dès sa sortie des stands, Michael améliorait son chrono personnel... et celui qu'Andrea avait réalisé avec la même voiture quelques minutes plus tôt.
" Après la séance, nous nous sommes assis en briefing. Andrea parla d'une petite série de bosses très difficiles à éviter. "La voiture est très nerveuse à cet endroit", précisa-t-il. Michael ne parlait pas beaucoup. Il était assis et écoutait. Je lui ai demandé s'il avait rencontré le même problème. " Oui pendant quelques tours. Si tu lèves à cet endroit, la voiture est instable", répondit-il, avant de poursuivre: "Alors je suis passé à fond, et le problème a disparu." Andrea l'a regardé, ébahi. Visiblement il ne comprenait pas. A un autre endroit, De Cesaris ne pouvait pas passer la sixième. Alors, il restait en cinq, et la monoplace était une nouvelle fois nerveuse. je me suis tourné vers Michael et lui ai posé la même question. Sa réponse fut éclatante: "Oui, oui, j'ai eu le même problème pendant quatre tours. Alors j'ai décidé de passer la première partie du virage en cinquième, de mettre la sixième au milieu, puis de freiner pied gauche. Cela calme la voiture pour la fin du virage." Andrea eut l'air perdu. Michael n'avait même pas mentionné ces choses, car, pour lui, elles étaient naturelles. Il n'en avait pas parlé tout simplement parce qu'il pensait que tous les autres faisaient la même chose. Que pouvaient-ils faire d'autre? Michael termina les qualifications à la septième place, en étant gêné dans sa dernière tentative. Il aurait pu faire encore mieux. Quatrième, je pense. " La course n'est pas à l'image de ces débuts éblouissants. Après un excellent départ, Schumacher abandonne, embrayage cassé.
Quelques semaines plus tard, Schumacher va signer chez Benetton. Trois saisons après, il raflera son premier titre de champion du monde. " Ce que j'ai vu en 1991 n'était sûrement rien ", conclut Foster. Aujourd'hui le pilotage de Michael doit être infiniment meilleur.